Finisterre. Le nom évoque une réalité oubliée. Pendant des siècles, ce port marquait l’extrême ouest de l’Europe et, du moins pour ceux qui habitaient ce continent, la fin du monde.

Dans mon cas, ce village marquera surtout la fin de mon Camino. Après 3 jours à Santiago, après les retrouvailles avec les amis pèlerins de partout sur la planète, je me rendrai à Finisterre pour marquer la fin de mon périple. C’est aussi après 2 nuits de sommeil dans une chambre que je ne partage avec nul autre voyageur, de multiples bains, le lavage à sec de tout ce que je traine depuis plus d’un mois dans mon sac à dos et une série de repas que je n’ai pas commandés du menu des peregrino… le tout bien arrosé d’un certain nombre de pichets de sangria. Je me sens humain à nouveau, ou presque. Santiago était un séjour bourré d’émotion. Le bonheur pur de l’entrée à la ville, en bonne compagnie avec mon amie Carmelle qui bouettait elle aussi à mes côtés, la satisfaction de pouvoir me tenir devant la cathédrale, de me remémorer le chemin parcouru. Les retrouvailles avec ma famille du Camino, une magnifique mosaïque humaine, assemblée de pièces venues de l’Afrique du Sud, de Seattle et de l’Alaska. L’occasion de méditer et de reprendre mon souffle quelque peu. Curieusement, je sentais que ma marche n’était pas encore terminée, qu’il me restait encore un bout de chemin à faire.

Avant même d’arriver en Espagne, j’avais déjà songé à la possibilité de poursuivre ma marche au-delà de Santiago, jusqu’à Muxia et Finisterre. Mais vu l’état de mon genou – en cours de guérison, mais loin d’être guéri –, j’ai dû renoncer à la poursuite de la marche à pied. J’ai déjà dépassé mes limites physiques. Mais je sens tout de même que je ne me suis pas tout à fait rendu au bout de mon pèlerinage. Je trouve une solution mitoyenne : alors que d’autres pèlerins poursuivront leur voyage à pied, je me rendrai à Finisterre en autobus. C’est pas tout à fait le Camino à l’état pur et absolu, mais après 800 km à pied, je ne sens plus que j’ai des preuves à faire à qui que ce soit. Une fois rendu sur place, j’espère avoir la force de me rendre jusqu’au phare qui marque la fin du Camino… et la fin du monde.

La route est agréable en autobus. Je continue de m’étonner de la facilité et de la rapidité du trajet, moi qui aie pris le rythme de la marche. Nous traversons quelques villages de la cote, le long de la route. J’aperçois l’eau. Après six semaines dans les montagnes, les vignes, les champs de tournesol, les forêts et le désert, quelle curieuse et heureuse sensation que de revoir l’Atlantique. C’est une journée typique de la région. Une journée de pluie et de gros vents. Le ciel gris est tout de même transpercé, ici et là, par des puis de lumière d’orée. C’est intense et beau.

ciel et lumière 2

J’arrive à Finisterre en pleine tempête. Un arrêt (à ne pas confondre avec une gare) d’autobus. C’est ou minimaliste ou encore mal organisé, selon notre point de vue. Je n’ai aucune espèce d’idée où se trouve mon albergue. Ah! Que serait le Camino sans ce perpétuel sentiment d’être perdu! Mais bon, au fil des km, j’ai quand même développé quelques bons réflexes. En entrant dans la ville, je remarque une pancarte qui annonce mon albergue. Mon point de chute à Finisterre se trouve au sommet de la ville. Il aurait fallu s’y attendre. Dès le début, à chaque fois que je me suis demandé « C’est par où??!! », la réponse a été « C’est par en haut. Grimpe, ‘stie! » Je monte lentement la pente, le vent et la pluie en pleine face. J’aurai bien gagné mon lit. Je m’étonne tout de même de pouvoir me tenir contre le vent. Mon genou m’en veut un peu, mais ce n’est rien à comparer à la douleur d’il y a quelques jours. Il y a une semaine, cette petite montée aurait été impossible. J’arrive au bout de quelques minutes, et la vue sur la ville vaut certainement l’effort.

finisterre

Venue l’heure du souper, je reviens sur mes pas et redescend vers le port et le centre-ville. Pour le repas, je me paye la traite : un plateau de fruits de mer gigantesque. C’est un festin exotique et dispendieux. Je suis comblé! Au cours de la nuit, la tempête s’éclipse. Je me réveille et je prends une bouffée d’air frais. Ça sent le sel de la mer. Il y a tellement d’étoiles que s’en est étourdissant.

Je me lève dès l’aube, prêt à entreprendre ma dernière journée de marche sur le Camino. Je laisse mon sac à dos à l’albergue. Je ferai ce dernier bout de chemin muni seulement d’une bouteille d’eau et de mes bâtons de marche. Nous sommes nombreux sur le sentier qui longe la route et qui mène vers le phare. Je retrouve aisément mon rythme de montée. Nous croisons quelques pèlerins sur la route du retour. Ils ont un regard lointain, et plusieurs ont les larmes aux yeux. Quand on leur souhaite Buen Camino – ce qui est devenu un réflexe au cours des dernières semaines – ils sourient, mais ne répondent pas. Au bord de la route, il y a une statue de pèlerin, tout en bronze. Son grand chapeau semble sculpté de telle sorte qu’on croirait que cette statue s’affronte aussi au vent perpétuel de la côte.

statue finisterre

J’arrive devant le phare au bout de 45 minutes de marche. Tous les pèlerins s’arrêtent devant le marqueur du km 0 pour prendre des photos. Ici, tout ce qu’il y a entre moi et le Canada, c’est l’Atlantique.

Au km 0

C’est l’aboutissement d’un long chemin pour nous tous. Je prends quelques photos d’une femme qui a complété le Camino à vélo, elle en prend quelques unes de moi. Deux choses me frappent, et me touchent. D’abord, qu’à l’extrême limite de la terre, on a installé un phare pour éclairer ceux qui oseraient aller plus loin. Il me semble que c’est un geste qui en dit long sur l’ambition de l’humain… un geste rempli d’espoir. Puis, je suis ravi de constater qu’à l’intérieur du phare (contrairement aux bouquins de Stephen King sur Roland qui entre dans la tour noire à la fin du monde) il y a une galerie d’art. Au bout du Camino, la mer, le ciel, un phare et l’art nous accueillent. Une fois de plus, je suis comblé. Dans le cahier du visiteur du phare, je signe une petite note pour Jane, qui arrivera à pied d’ici un jour ou deux.

phare finisterre

Au retour, j’ai moi aussi l’eau aux yeux. C’est la fin de ma marche, de mon Camino, de ce rêve et de ce projet qui m’habitent depuis près de deux ans, et qui auront provoqué toute une série de décisions importantes et révolutionnaires dans ma vie. Je me permets de songer à l’avenir. Aux amis qui m’attendent, d’abord à Madrid puis après, au Canada. J’anticipe avec plaisir la semaine que je passerai à Barcelone, en résidence d’écriture. Je ne sais pas quelle forme prendra l’inspiration artistique qui découlera de ce périple, mais je suis persuadé qu’une semaine ne suffira pas pour écrire toute la musique qui me passe par la tête. Je suis heureux d’avoir réservé ce séjour, d’avoir prévu un moment artistique avant de renouer avec la vie de tous les jours. De fait, je ne sais plus trop à quoi ressemblera ma vie de tous les jours… me voilà sans emploi pour la première fois depuis plus d’une décennie. Heureusement qu’à mon retour j’aurai la production du nouveau spectacle et la tournée de lancements de mon nouvel album pour m’occuper. J’espère pouvoir préserver cette quiétude intérieure, cette santé renouvelée, cette force que je n’aurais pas soupçonnée avant de partir. Je me dis, me répète, que le bonheur est simple… mais la vie résiste.

ciel 2

J’ai le cœur léger. Je reçois des textes, des appels. Des amis qui me saluent, qui veulent prendre des nouvelles. Tous me félicitent de cette belle aventure. J’appelle ma mère. Elle ne répond pas. Je lui laisse un message sur son répondeur pour qu’elle sache que je me suis bien rendu, jusqu’au bout de mon chemin. J’espère qu’elle entendra le bonheur dans ma voix… J’espère que tout va bien de son bord.

À Arzua, je conviens d’une entente avec mon corps. S’il me porte jusqu’à Santiago, je lui donnerai le temps qu’il faut pour s’en remettre. On prendra l’autobus pour Finistère. Je serai raisonnable. J’espère que l’entente tiendra…

La marche d’Arzua à O Pedrouzo est douloureuse. Une 5 e journée consécutive de pluie torrentielle. Il y a de la boue, et d’autres substances organiques, partout sur le sentier. Je marche souvent sous des eucalyptus, et la boue est moins pénible que la pierre pour mes pieds… Mais c’est tout de même difficile comme parcours. Puis, heureusement que j’ai trois paires de bas secs. Je change de bas aux deux heures, et malgré ça, je sens des ampoules qui commencent à former. Puis, j’ai une nouvelle douleur dans mon avant jambe droite. Je crains qu’à force de compenser depuis plus d’une semaine pour mon genou gauche, qui ne vas toujours pas bien, de nouvelles blessures ont développées.

La pension où j’héberge à O Pédrouzo est magnifique… Propre… Reposante. La propriétaire me recommande un excellent resto pour le souper, où je prend un des meilleurs repas de tout mon Camino. Les pèlerins chuchotent au souper. Il semble que le Botafumeiro, ce grand encensoir mythique de La cathédrale de Santiago, ne sert plus souvent lors de la messe… À moins que quelqu’un n’accepte de commanditer son usage par un don de 300 euros. Toutefois, il serait prévu de l’utiliser lors de la messe de midi demain. Plusieurs révisent leurs plans pour arriver à temps. Pas moi. Je me croiserai les doigts pour qu’il serve aussi à la messe de 7h30.

Je dors à moitié. J’ai hâte de marcher, hâte de me rendre. Puis, je suis fébrile devant l’idée de compléter ce Camino.

Je quitte avant la levée du jour. Par un moment de folie, je tourne une vidéo promo pour la Galicie… Province qui m’a tant enchantée… 😉

Depuis Sarria, les pèlerins sont de plus en plus nombreux sur le sentier. Je marche parmi une foule de centaines de pèlerins. Tout le monde jase. Tous sont heureux d’être presque rendu. Nous marchons sous une pluie légère. Puis, on entrevoit le soleil! Quel plaisir!

Je traverse une série de petits villages… Aucun d’entre eux n’inspire grand chose. Puis, nous entendons le bruit assourdissant d’avions qui décollent. Nous marchons le périmètre de l’aéroport de Santiago. Dorénavant, le sentier passe par les rues d’asphalte et de béton des banlieues de la ville. Puis, quelle surprise, nous montons! Nous approchons de Monte de Gozo (le mont de la joie… On dit qu’il se nomme ainsi puisque c’est à partir de cet endroit que les pèlerins peuvent entrevoir les tours de la cathédrale pour la première fois. J’ai une autre théorie: on l’a nommé ainsi car c’est la dernière maudite côte qu’il faudra grimper avant d’arriver à notre destination!) Au sommet de la montée, il y a un monument à la visite du pape Jean-Paul II. Puis, un immense dortoir de 400 lits… Le tout dernier point d’arrêt pour les pèlerins avant l’entrée dans la ville.

Le monument me rappelle la visite du pape à Midland en 1984. Ce jour là, aussi, nous nous étions réveillé très tôt et avions marché longuement avant d’arriver sur le site, à la cathédrale des Saints Martyrs Canadiens. Nous étions plus de 50 000 ce matin là.

Je profite d’un temps d’arrêt pour jaser avec d’autres pèlerins. Je ferai les 5 derniers km en compagnie de Carmèle, du Québec, avec qui j’avais soupé et beaucoup ricané, à Villafranca. Elle est blessé, moi aussi. On s’encourage et on avance lentement.

galicie_01L’entrée en ville est longue. De fait, il faudra traverser la ville avant d’arriver à la cathédrale. En entrant dans la vieille ville, en attendant que change un feu avant de traverser la rue, nous retrouvons Hannah et sa mère Èva. J’arriverai à la cathédrale en compagnie d’amis rencontrés dès mon premier jour de marche. L’hasard fait bien les choses.

C’est de la musique qui nous guide jusqu’à la cathédrale. J’entends de la cornemuse. Carmèle anticipe des écossais en kilts… Mais c’est de la musique traditionnelle de la Galicie. L’arrivée devant la cathédrale est émouvante pour tous. Pour moi, c’est la culmination d’un rêve vieux de plus de 18 mois… L’aboutissement d’un projet qui aura provoqué des changements importants à ma vie. La fin d’une épreuve physique comme j’en ai jamais connu auparavant.

À peine sortie de mon hôtel, à la recherche de quoi me mettre sous la dent, je retrouve Jane. Elle est folle de joie. C’est elle qui me guidera jusqu’à l’office des pèlerins, où je cueillerai ma Compostella. Elle m’explique aussi que l’on peut obtenir un deuxième certificat, dans une des églises de la ville, pour commémorer le 800e anniversaire du pèlerinage de St François D’Assise à Santiago.

galicie_05Je passerai trois jours à Santiago. Des retrouvailles avec ma famille du Camino, du temps en touriste, la messe et un souper de l’Action de grâce en solo dans une vinoteca, à manger des pinchos et à écouter du rock rétro Américain. Je tâche aussi de me reposer… De me guérir. Je dors encore avec les jambes soulevées. Je n’ai pas encore retrouvé ma cadence de marche habituelle… Mais ça s’améliore. Je n’ai aucune idée ce qui m’attends lors de mon retour à la vraie vie… Je ne suis pas encore prêt à y penser.

Curieusement, bien que je suis profondément soulagé d’être arrivé à Santiago, je ne sens pas que mon camino est terminé. Je ne me sens pas, non plus, en mesure de tracer le bilan de ce voyage, ou encore à en parler avec mes bien aimés qui n’ont pas eux-mêmes vécu le trajet. Je sens qu’il faudra une période de transition. Je poursuivrai d’abord vers Finistère… Par autobus 😉

galicia

Après la Cruz de ferro, la montée se poursuit jusqu’à Alto de Cerezales, le plus haut point du Camino Frances, à plus de 1500 mètres. J’y arrive vers 10h30. L’avant-midi figure parmi mes étapes préférées du Camino. La levée du jour sur la montagne… C’est exquis. Puis, comme c’est toujours le cas dans la vie et sur le Camino, après la montée, il faut descendre… Sauf que cette fois, c’est tout de même une descente exceptionnelle. L’on passe de 1500 mètres à 500 mètres… Ça dure 20 km. Tout ça se fait sur une série de surfaces que je refuse de nommer « sentier » ou « piste » ou « chemin ». Éboulement serait plus juste. Il y a que de la pierre, soit le roc de la montagne, soit des cailloux brisés de cette surface. Il n’y a pas de terre et rien n’est stable. À chaque fois que je pose un pied, il glisse puis il tourne. Mes genous me maudissent et je sens l’enflure qui monte dans mes pieds.

À mon arrivée, j’écrirai une note au Ministre des Affaires Étrangères, pour lui conseiller d’inclure un râteau et un niveau pour l’Espagne dans la nouvelle entente de libre échange entre le Canada et l’Union Européenne… Je serais ravis de passer moi-même les acheter chez Canuck Tire, et les déposer à son bureau de circonscription, à quelques coins de rue de ma maisonnette à Ottawa.

galicia_02Je m’arrête à El Acebo, à mi-chemin sur cette pente interminable. Je trouve un hostel, au-dessus du bar du village avec une chambre magnifique. Depuis la blessure, je ne m’intéresse plus aux albergués. Il me faut de la place, un peu d’espace, surtout le matin, car je mes préparatifs pour la journée sont douloureux, et j’avance au ralentit.

Le lendemain, c’est le retour à la pente. J’ai terriblement mal aux pieds. Le paysage est extraordinaire, mais le terrain est débile. Après 4 heures de marche, sans pour autant être rendu au bas de la montagne, alors que les toits de Molinaseca sont encore loin, je m’assoie par terre, entre le sentier de pierre et le précipice de l’autre bord pour changer mes bas et me masser les pieds.

J’entre et je sors de Molinaseca. Mon objectif, Ponferrada, se trouve 8 km plus loin. Je suivrai, sans faire exprès je vous le jure, des Américains à la sortie de Molinaseca. Ils m’induisent en erreur et me font faire un détour de 2,5 km vers Campo. Détour inutile et inéteressant par une banlieue où on ne démontre aucun intérêt pour les pèlerins. J’entre de peine et de misère à Ponferrada, et m’écrase sur mon lit. Il m’aura fallu plus de 8 heures de marche pour parcourir 18 km. Mes pieds sont tellement enflés que je peine à retirer mes souliers.

Mais j’aime, beaucoup, Ponferrada. Je décide d’y rester une journée supplémentaire, en touriste. Je passe la majeure partie de la journée à visiter un château Templier, bâtit entre le 10e et le 16e siècle. La ville moderne entoure ce château. C’est fascinant. Je suis heureux.

Au cours de la journée, j’apprends que mes amis Brian et Elliane Ont mis fin à leur Camino. Brian souffre de nombreuses blessures, et n’en peut plus. Il est à bout de souffle et renoncé à la marche. C’est aussi le cas pour mon ami Susan. Son genou ne vas pas mieux. Elle décide donc de quitter le Camino pour se donner une semaine de repos. Elle suivra aussi une formation intensive de formation en Espagnol, afin de revenir mieux outillé. Naît l’idée, lors d’une série de courriels, de se donner rendez-vous à Santiago pour se revoir une dernière fois avant de repartir vers nos pays respectifs. Je fais le calcul. À la vitesse que j’avance actuellement, je ne me rendrai pas à temps pour revoir les autres.

Je repasse mes cartes du Camino au peigne fin. Qu’est-ce qui m’attend d’ici quelques jours? Je compte encore deux montées importantes d’ici quelques jours. La pire sera O’Cebreiro qui nous fera monter de 600 à 1400 mètres, en l’espace de 6 km. C’est de la pente en maudit. Puis, le Camino se complique davantage… Les sentiers se multiplie en entrant en Galicie. Je fais le bilan du chemin parcouru, du chemin qu’il reste, de mon état physique, émotif, etc. Je n’ai pas peur. Je serais capable. Mais lentement. Je raterai mes amis et ça me désole. Puis, dans mon fond intérieur, après quelques 600 km de marche, je ne sens plus le besoin, par principe, de prouver quoi que ce soit à qui que ce soit.

Je décide de passer de Ponferrada à Sarria en train. C’est une distance d’environ 90 km. Ça m’épargnera environ 4 jours de marche. Il me restera un peu plus de 100 km à parcourir à pied en Galicie. Je suis en paix avec ma décision. J’en informe mes amis, qui se réjouissent de l’opportunité de me revoir. Le train part dès 6h30.

Ma récompense pour cette décision? Le seul moment de peur profonde et viscérale du voyage. La gare de train est à quelques km de mon hostel. À 5h30, les rues de la ville sont presqu’en désertes…. Mais je sais que les quelques individus que je croise ne sont pas du genre à aider ou à prendre pitié d’un pèlerin qui peine à porter son sac. Je marche très, très vite. J’estime que la marche jusqu’à la gare devrait me prendre environ 45-55 minutes… Vu mon état d’âme, j’arrive à la gare – épuisé et dégoulinant – en 27 minutes.

Le voyage en train est un plaisir pur. J’adore les trains. Je suis aux petits oiseaux en arrivant à Sarria. C’est le dernier point de départ véritable du Camino. Plusieurs pèlerins partent d’ici, car il faut marcher au minimum les 100 derniers km afin d’avoir droit à l’attestation officielle de pèlerin, la compostella.

Le train est plein à craquer de pèlerins… Surtout des élèves d’âge secondaire, qui doivent parcourir le Camino afin d’obtenir leur diplôme. Il y en a au moins une centaine. Je sens le début d’une nouvelle course aux lits.

Le paysage a drôlement changé. Au bout de quelques instants, je comprends pourquoi. Il pleut beaucoup et perpétuellement en Galicie. Sobre la marcha! Let’s go tabarnouche, c’est le home stretch! J’entreprends cette dernière série d’étape avec un nouveau feu intérieur qui brûle à pleine force. J’ai hâte d’en avoir le cœur net, et la seule façon d’y arriver, c’est de compléter cette marche.

Autre changements importants: de nouvelles odeurs m’entourent. Il y a de l’eucalyptus en Galicie. J’adore. Il y a aussi des vaches… Et des résidus de repas de vache… Partout… Notamment, une couche de quelques centimètres qui recouvre le sentier au complet. Je comprends pourquoi à ma sortie de Sarria. Tout d’un coup, en tournant un coin sur le sentier, je me trouve entouré par troupeau d’une cinquantaine de vaches. De toute évidence, les fermiers se servent du Camino pour faire passer leur bétail d’un pâturage à l’autre. C’est mon deuxième stampede du voyage… D’abord des brebis, asteur des vaches!!

Moi qui croyais avoir dépassé les montagnes… Je me détrompe rapidement. Désormais, elle sont moins hautes, mais plus nombreuses. Ça monte, puis ça descend. Pète, répète. Tout ça sous une pluie qui varie entre « Ah, que c’est rafraichissant! » et « Au secours, je ne sais pas nager!! » Sans farce, par bout ça ressemble davantage à de la natation verticale qu’à de la marche. Mais les forêts d’eucalyptus sont magnifiques, et les petits villages qui surgissent de nullepart sur les côtes vertes le sont aussi. Puis, les Gallegos sont d’une générosité extrême. Après 23 km sous la pluie, je m’arrête à Mercadoiro, dans le plus beau hostel de l’Espagne. On se croirait dans un hôtel boutique. Je suis gâté. Puis, la soupe aux lentilles et chorizo, une nouveauté au menu accompagné de pain frais, fait à la maison, est merveilleuse! Le bonheur dépend de peu de choses. Mercadoiro, population officielle: 1… Notre hospitalero, et le propriétaire de l’hostel, qu’il a lui-même bâtit à partir des ruines d’une terre…

Le lendemain, je passe par Portomarin. Pour entrer dans la ville, le camino passe par un des trois ponts. Il mène au bas d’un escalier d’une centaine de marches. Je regarde le ciel et demande « Vraiment? Tu veux que j’grimpe c’t’affaire là asteur? Pour trouver un guichet puis une bouteille d’eau? Vraiment? Ok… C’est vrai que j’ai pris le train… Désolé. » Pour sortir de la ville, le Camino nous invite à passer par les deux autres ponts. Pas un ou l’autre… Les deux. De toute évidence, il y a quelqu’un qui s’est amusé avec un pot de peinture jaune par un soir d’enterrement de vie de garçon. Ah Portomarin, que de doux souvenirs!

Je me rends jusqu’à Eirexe. Me semble que le nom de la place ressemble à mon prénom. J’suis plutôt crevé en y arrivant. La pluie sape ce qu’il me reste d’énergie. La pluie, puis la boue. Je pose les pieds au resto, à la recherche de mon cola quotidien (petit rituel d’après la marche, avant la douche) et j’entends un cœur de voix qui exclament « ÉRIC! » Je retrouve Hannah, sa mère Èva, les suédoises que je connais depuis Orisson, et Katrin, de l’Allemagne, qui a elle-aussi, beaucoup marché avec Jane. Il y a toute une série de hugs, puis j’aurais presque envie de brailler, tellement je suis heureux de les revoir. Je jase avec mes amis Suédoises tout au long du repas. Elles sont formidables. Hannah est une superwoman! Véritable athlète, pour elle le Camino est un plaisir pur. C’est aussi le cas pour sa mère, qui souffre de quelques ampoules, mais qui a l’eau aux yeux en me parlant des personnes extraordinaires qu’elles ont croisées sur le chemin. La soirée rehausse mon morale comme par magie. Et justement, à ma sortie, je Remarque une vieille affiche sur le mur qui fait la promotion d’un grand magicien: le Dr Saa, Conde de Waldemar. Il semble qu’un des aïeux du proprio du bar était un illusionniste de renommée mondiale au début du 20ème siècle. Ah, la magie du Camino!

De Eirexe, je passe par Palas de Rei, où j’obtiens mon premier cello du jour en entrant à l’église du village. Le curé prends le temps d’étudier et de réparer mon crédencial, abimé par la pluie, à l’aide d’un rouleau de Scotch tape. Il a vu pire et me souhaite buen Camino! Ma journée se termine à Melide, une ville étonnante du fait qu’elle n’a absolument rien d’attrayant ou d’intéressant… Jusqu’à l’heure du souper. Alors, à la pulperia Ezekyel, le party pogne et le vin verse à flots pour bien arroser la chaire de pieuvre, délicieuse.

galicia_04De Melide, je marche jusqu’à Arzua, où j’ai – tout comme plusieurs autres pèlerins – beaucoup de difficulté à trouver un lit. Il faut comprendre que Melide marquait aussi un point de convergence pour trois Caminos, qui cheminent tous vers Santiago. Désormais, les sentiers et les albergués débordent. Je prends un repas simple, copieux, bien arrosé, et m’écrase sur mon lit. Deux jours de marche. Il me reste deux jours de marche.

Entre Arzua et O’Pedrouzo, la pluie n’arrête jamais. Le sentier ressemble plus souvent que non à une rivière. On marche dans la boue, et autres substances organiques (vous vous souvenez des vaches?) jusqu’au chevilles. Je chérie l’idée de devenir le porte parole de tourisme Galicia! J’imagine l’annonce publicitaire tout en écoutant mes bas qui font plrrrp plrrrp dans mes botes. Je trouve une merveilleuse pension: Pension Maribel, et on me conseille un resto ou je dévore le meilleur poisson goûté depuis mon arrivée en Espagne.

galicia_03Il me reste 18 km à parcourir. Je suis ému. Qu’est-ce qui me passe par la tête? Le goût de marcher. De bien marcher. Le goût de profiter pleinement de ma journée demain et de tout ce qu’il me reste du Camino. Si Dieu le veut, j’arriverai demain à Santiago.

 

 

 

visages_02

Au fil des kilomètres, les visages que l’on croise à plusieurs reprises sont nombreux. Les blessures viennent freiner les plus rapides. Certains gèrent mieux les côtes, d’autres les plaines. Chaque village, chaque albergué, marque une occasion surprenante de revoir quelqu’un que l’on croyait soit loin devant, ou loin derrière nous.

J’ai un semblant de famille sur le Camino. Jane, avec qui j’ai marché très tôt le matin pendant plus d’une semaine, Eliane et Brian et Susan.

Couple typique du Seattle,  Eliane travaillait pour la centrale administrative de Starbucks alors que Brian travaillait chez Microsoft. Pèlerins au sens pur, ils ont quittés leurs emplois respectifs et vendu leur maison pour mieux prendre la route. Ils m’expliquent que le Camino, que Eli a d’ailleurs déjà parcouru en solo, n’est pour eux qu’une étape d’un séjour d’environ 6 mois en Europe. Eli est l’une des deux personnes que je croise sur le Camino qui ne fait aucune ampoule, et qui semble cheminer aisément, sans douleur. Elle aime chanter. Quand nous marchons ensemble avant la levée du jour, nous chantons « Singing in the rain »… par une journée où il n’y aura pas un seul nuage dans le ciel et il finira par faire 38 dégrées en après-midi. L’ironie et le plaisir.

Brian à plus de difficulté. Comme moi, il trouve que le Camino est une rude épreuve. Il partage aussi mon dédain pour les albergués… Et pour John Brierley. On se dit qu’on pourrait rédiger « The Gentleman’s Guide to the Camino; Fine Hotels on the Way to Compostella ». L’idée me plait.

L’amour qu’ils ressentent l’un pour l’autre est palpable. C’est un couple qui communique bien, qui partage des ambitions semblables et une même vision du monde. Ils sont beaux à voir!

Susan est une de ces personnes qui sait lire les gens, qui les voit clairement. C’est une femme forte et brillante. Son corps la trahie sur ce voyage. D’abord, elle se blesse au genou. Elle est la première à m’apprendre le mot « hielo », Espagnol pour « glace ». Puis, ses pieds sont recouverts d’ampoules. Elle souffre beaucoup. Mais elle est experte des farmacias! C’est elle qui me parle du Compede pour la première fois… Cette substance magique dont les Européens se servent pour recouvrir leurs ampoules. Je lui offre du duct tape canadien en contrepartie.

C’est grâce à Jane Que j’apprends à connaître ces gens. Elle se dit la mère adoptive du groupe. Mère poule, certainement, mais aussi une véritable mère, pleine de tendresse et de bonne volonté pour ceux qu’elle rallie au groupe. Prof d’ergothérapie en Afrique du Sud, le bien-être de notre petit regroupement lui tient à cœur. 

Maria vient du Danemark. Je suis étonné par le nombre de femmes du Danemark, dans la soixantaine, que je croise sur le Camino. Elles sont fortes, souriantes, heureuses d’être sur la route, malgré les rigueurs et la douleurs. Elles prennent plaisir à la vie. Maria, par contre, marche seule et dans le silence. Nous soupons à la même table à Orisson, mais je l’entends à peine prononcer un seul mot au cours du repas, et rien du tout depuis. Elle a toujours un sourire aux lèvres, un air un peu rêveur. 

À Trinidad, assis dans la cour du monastère où nous passerons la nuit, je partage mon jus d’orange avec elle. Elle me parle du besoin de silence pour s’ouvrir à soi. Une travailleuse sociale jeune retraitée car son boulot était devenu trop bureaucratique. J’ai au moins un ami qui se reconnaîtrait dans cette histoire. Elle parle longtemps. D’un seul jet. Comme si elle gardait tout ça embouteillé depuis des semaines. Elle m’explique que c’est son troisième Camino. Plutôt, c’est sa troisième tentative de Camino. Elle a dû renoncer à son premier voyage pour entrer chez elle, soigner un fils qui a presque mon âge, gravement blessé dans un accident de voiture. À sa deuxième tentative, c’est elle-même qui subit la blessure. Elle se casse une jambe sur un des sentiers près de Logroño. Elle doit renoncer, à nouveau, à Santiago. Elle revient à la charge cette fois, et se dit plus à l’écoute du camino… Plus consciente de sa cadence, moins perturbé par des distractions mondaines. Son ouverture me touche beaucoup. Je lui souhaite, enfin, de pouvoir poser les pieds à Santiago.

Je croise Clare, pour la première fois, à la sortie de Leòn. J’ai pleinement profité du petit déjeuner à mon hôtel, et part donc après 8h. Je suis étonné de voir d’autres pèlerins qui partent aussi tard que moi. Je la remarque à sa sortie d’une boulangerie. Elle est difficile à ne pas remarquer… Elle est rayonnante, même dans la tenue habituelle de pèlerin. Je la regarde entrer dans un albergué et saluer ses copains de marche avec beaucoup d’enthousiasme, fière d’avoir trouvé du pain frais pour tous. Je la retrouve quelques heures plus tard, à l’entrée du camping à Castrojeriz. L’accueil n’est pas clairement indiqué et nous sommes trois à chercher la réception au bout d’une longue journée de marche. C’est alors que je rencontre Jesse, son copain de marche. Il n’a pas l’air heureux dans son cœur. Nous trouvons l’accueil et, heureuse surprise, on nous propose trois lits dans un petit chalet, plutôt que dans un grand dortoir. C’est le bonheur. Chacun s’empresse à s’installer, puis Clare s’affirme: « Ok guys, boots off and outside! It smells like man in here! » Jesse est blessé (shin splints) et démoralisé. Clare le soigne comme le ferait une infirmière de vocation. Elle est tendre et patiente au plus haut point. Une semaine plus tard, je la croise à ma sortie d’Astorga. Mon genou gauche supporte à peine mon poids et elle vient de passer une journée au lit à souffrir d’un empoisonnement alimentaire (la paella à Andrew? Peut-être bien!) Nous marchons ensemble pendant la matinée. Ce sont parmi mes plus belles heures du Camino. Elle m’explique qu’elle travaille dans une bibliothèque à Perth, en Australie. C’est son premier voyage solo et son premier séjour. Elle est joyeuse… Perpétuellement joyeuse. Clare is a tough cookie. C’est une femme forte, qui prend plaisir à vivre simplement. Je l’admire. Elle m’offre une épinglette en forme de kangourou au moment où on se quitte. Depuis, je porte ce petit emblème sur mon chapeau.

Je soupe avec John et Cathy au repas collectif de l’albergué à Bellorado. C’est un couple de jeunes retraités du Minnesota. Un enseignant et une infirmière. Ni un, ni l’autre n’est intéressé par une vie sédentaire, devant la télé. Nous parlons de Obama, du piètre état du système de santé publique Américain, de l’importance d’une éducation universelle de qualité. Puis, ils me confient que leur beau-fils est le cuisinier en chef de Minnesota Twins. » Isn’t Justin Morneau (ancien joueur de premier but des Twins) Canadian? Our son in law got to know him really well… Nice fella. We get free tickets all the time ». Ceux qui connaissent ma passion pour le baseball pourront deviner que la discussion m’allume drôlement!

Leanette and James sont un couple remarquable du Texas. Je les rencontre sur la terrasse à El Acebo. À leur entrée en ville tout le monde les salue et les félicite… Plusieurs vont jusqu’à les applaudir. El Acebo est à mi-chemin d’une descente effrayante de montagne, qui dure 15 km. Ils sourient… Soulagés d’arriver en ville. Assis à ma table pendant que James passe au bar s’acheter une bière, Leanette me raconte qu’ils chérissent l’idée de ce voyage depuis plusieurs années déjà. Ils viennent de finir de payer leur hypothèque et les enfants sont grands, alors le moment du périple est venu. Leanette chemine dans un fauteuil roulant, que James pousse avec courage, depuis bien avant mon début de Camino. Il m’explique qu’ils devront filer vers la prochaine ville pour acheter de nouveaux freins… Tellement la descente à été pénible. Il prend deux bières dans le temps de le dire. Leur complicité est évidente.

Je rencontre Chris à la sortie du train à Sarria. Elle sort du mauvais bord. Vue qu’elle est la première à débarquer, nous sommes une dizaine qui suivons derrière elle. Heureusement qu’un autre train ne passait pas… Sinon, fin de camino! Nous prenons un café ensemble et elle sert d’interprète entre moi et la proprio, qui raconte (à pleine vitesse et avec verve, dans un mélange d’Espagnol, de Gallego et de Portugais) qu’avant notre arrivée, un homme a tenté de voler le contenu de sa caisse. Elle est encore à fleur de peau. (Il semble qu’elle l’aurait taper dessus jusqu’à ce qu’il file, sans pour autant informer la police. Elle craint le retour du voleur inepte.) Chris arrive de Barcelone. Elle n’a qu’une semaine pour faire le Camino… Ce pourquoi elle part de Sarria. Elle est drôle, parle un Anglais passable avec un accent charmant, et a l’air d’avoir l’âme d’une véritable vagabonde. C’est une fille cool. Elle se tisse rapidement un réseau sur le chemin. Je la revoit partout en Galicie, tantôt avec un groupe de jeunes femmes, tantôt avec des gars du Sud de l’Espagne. Elle me remonte le morale, me conseille des restos (dont Ezekiel pour de l’excellente pulpo ala Gallego à Melide, et m’aide à repérer le Camino à la sortie de la ville. Elle travaille en génie mécanique, mais son boulot la passionne peu. Elle dévore la vie. L’avenir de l’Espagne me semble entre de bonnes mains.

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cruz_01Je pose trois pierres au pied de la Croix de fer…

Depuis plus d’un millénaire, des pèlerins posent une pierre, portée depuis leur départ de la maison ou cueillie en cours de Camino, au pied de cette croix.

La légende veut qu’un pèlerin qui pose une pierre à cet endroit se voit soulagé de tout fardeau (pêché, tristesse, deuil, peine, etc.) La croix, dit-on, assume ces fardeaux, et en libère les pèlerins.

Des millions de pèlerins sont passé par cet endroit. Imaginez la quantité de pierres! On en trouve de toutes les tailles, portées depuis partout sur terre au pied de la croix. Le monticule fait 10 mètres de haut à certains endroits, et plus de 20 mètres de circonférence. Au bas, on s’étonne de trouver non pas des cailloux, mais des rochers de taille considérable. Au fil des ans, certains ont inscrit des notes sur leur pierre. Leur nom, leur pays d’origine. D’autres ont rangé des notes, des lettres, des photos, des icônes sous certaines pierres. Certains fixent une note ou une image à même le bas de la croix elle-même. Ce sont des prières, des histoires, des hommages à un être cher perdu. Il y en a des milliers. Ce sont des semblants d’intentions, pour soi, pour autrui.

cruz_05À son arrivée, chacun grimpe le monticule, pose sa pierre, sa note, etc. On respecte ses moments solitaires. Tout se fait dans le silence. Il y en a qui jasent à proximité, mais pas un mot ne se dit sur le site.

Au début de mes lectures, et depuis, le rite de la Cruz de fer m’interpelle. Au fond, n’avons nous pas tous une peine, un souvenir, un regret, un fardeau quelconque que nous ne souhaiterions ne plus avoir à porter dans la vie, mais dont on n’arrive jamais tout à fait à se défaire? Depuis ma blessure, il y a quelques jours, ce moment me motive, m’incite à poursuivre.

 cruz_04Je pose trois pierres.

La première, rouge, cueillie au cimetière à Perkinsfield, où repose mon père depuis bientôt 20 ans.

La seconde, bleue, cueillie dans un des jardins de fleur de ma mère, il y a quelques années.

L’espoir du soulagement, c’est peu de chose à offrir, vue la vie qu’ils m’ont donné.

La troisième, blanche, je l’ai cueillie il y a plus de trente ans, dans la cour de l’école du village où j’ai grandi. Il me reste encore un bout de chemin et de vie à faire, mais cette école n’est plus qu’un souvenir, tout comme l’enfant que j’étais à l’époque.

Je pose ces pierres et souhaite que nous puissions tous trouver une façon de soulager le fardeau que nous portons sur notre chemin.

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Ça y est. C’est le temps. Depuis trois jours, j’ai à peine quitté mon lit, sinon pour manger de temps en temps et pour passer à la farmacia. Toute l’équipe de l’hôtel est au courant. À l’entrée, à la sortie, au petit déjeuner, même la femme de ménage me demande comment va ma rodilla!

J’ai encore mal au genou gauche, et je marche tout croche, mais je n’en peut plus de rester embarré dans ma chambre. Je me dis que faudra prendre ça mollo. Je me rendrai au prochain village, à 6 km. Je sais que j’avance au ralentit, et chaque pas me fait mal, mais le Camino m’attends et je ne suis pas près à y renoncer.

Pendant ma convalescence, je refais ma valise. Je me débarrasse de tout ce qui ne m’as pas encore été utile. Bye bye chemise anti-bébittes! Peace out poncho de pluie! (Ça m’épargne quelques onces. Je me procure aussi un support pour genou. Ça me rassure… Pour la première fois depuis trois jours, je n’ai pas l’impression que je vais m’écraser dès que je me lève debout.

sortie_01Je déjeune, prend un café, puis je prend la route. C’est le jour du marché à Astorga. Je contourne les camions et les kiosques. Chaque pas est pénible. J’ai un sourire aux lèvres, grand comme le Canada.


Au bout de 20 minutes, je suis sorti de la ville. Je suis reconnaissant d’avoir pu me rendre si loin (2 km) après avoir eu autant de difficulté à me rendre à l’ascenseur depuis 3 jours.

En 75 minutes j’arrive à Murias de Rechivaldo. 6 km de fait. Je m’assoie, évalue la douleur, et décide de poursuivre encore un peu. En sortant du village, je retrouve Clare, l’australienne avec qui j’avais partagé un chalet à Castrojeriz. Quel plaisir de la retrouver. Au moment où nous nous sommes quitté, son copain de voyage avait une blessure grave à la cheville. Elle m’explique qu’il souffre encore, à piqué une méchante déprime, et chemine désormais par autobus. Clare, quand à elle, souffre aussi. Elle est malade et déshydraté depuis deux jours. Elle s’étonne de me voir marcher. « You’re leg’s really fucked up, isn’t it? You’re limping terribly! » 2 minutes après ce constat tout à fait juste, alors qu’elle prend une gorgée d’eau, elle me poignade de sa canne à marcher. Juste en-dessous du genou gauche. Elle s’excuse abondamment, et nous marchons ensemble, lentement, en riant.

Des escargots nous dépassent. Des limaces nous dépassent. Des octagénaires Allemands nous dépassent sans même nous remarquer. Nous rions. Nous constatons qu’en avançant au ralenti, nous apprécions davantage la beauté du paysage. Nous arrivons à Santa Catalina et je constate que mon rythme habituel n’est que peu affecté par ma blessure. Je me demande à quel point je marche lentement d’habitude!

Après 40 minutes de procrastination, Clare poursuit sa marche vers Rabanal. Elle prévoit arriver en fin d’après-midi. Je me trouve un lit, fais ma lessive, lève ma jambe, et passe l’après-midi à écouter le nouvel album (sublime!!!!!!) de Willows (aka: Geneviève Toupin) tout en regardant passer les nuages par la fenêtre de ma chambre.

Quelques mots sur la douleur: La quasi totalité des pèlerins souffrent pendant au moins une partie sinon tout le Camino. Je connais une seule personne qui n’a pas eu d’ampoules. Les tendinites et les entorses sont fréquentes. L’enflure est perpétuelle. Plusieurs se réveillent après quelques jours avec un ou plusieurs orteils bleu/noir. D’autres, et c’était très fréquent pendant la première semaine, perdent les ongles des orteils à force de monter et de descendre dans les montagnes. D’autres porteront de nouvelles cicatrices à leur retour au bercail, résultat d’une chute sur un sentier inégale ou une pente un peu trop raide.

Les os brisé, notamment les chevilles et les os du pieds sont aussi assez habituelles. Les pèlerins craignent ces blessures, qui peuvent mettre fin à la marche.

Les remèdes et baumes sont innombrables, tout comme les pharmacies. Les pilules sont universelles. L’ibuprofen est connue comme « pilgrim’s candy », et les pèlerins en avalent en quantités industrielles.

sortie_02Somme toute, je distingue entre deux sortes de douleur: la vieille douleur, et la nouvelle. La vieille douleur, les ampoules de la semaines dernière, nous rappelle que nous sommes vivants. La nouvelle douleur, inconnue, est une source importante d’anxiété. Est-ce grave? Est-ce que c’est permanent? Ce sont des questions qu’on se pose quotidiennement. Plus souvent, la douleur frêne notre progrès, nous frustre, viens saper l’énergie.  Certains sont même craintifs quand une vieille douleur s’atténue soudainement. Mais elle est un compagnon de route fidèle, et chacun de nous s’y habitue, et gère la douleur à sa façon. La douleur est une partie intégrale du Camino.

astorga_04Depuis plusieurs jours, je traverse la méseta. Une série d’étapes qui traversent les plaines au milieu de l’Espagne. La senda, cette autopiste pour les pèlerins, me mène d’un village à l’autre, et les kilomètres s’enchaînent . Les villages et les jours fondent les uns dans les autres.

La course aux lits s’est atténuée. Entre 12h30 et 13h30, peu importe où je suis rendu, je m’arrête et m’installe pour la nuit. J’ai trouvé mon rythme. Bonhomme allant, je parcours entre 20 et 25 km par jour. Je plonge dans mes pensées. Je fredonne. J’écris. Je réfléchi. Pour la première fois depuis des années.

Les pèlerins que j’ai connu disparaissent. Certains, plusieurs, renoncent à ces étapes qu’ils trouvent ennuyantes, où un paysage plat défile devant nos yeux à longueur de journée et où l’on peut marcher 20 km sans voir une habitation humaine. Ils sont nombreux à embarquer dans l’autobus pour filler à toute vitesse vers la prochaine ville.

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À Sahagun, je passe la nuit dans un immense couvent. Autrefois, des centaines de sœurs de Santa Cruz y résidaient. Ce sont les cousines des Sœurs de Sainte Croix omniprésentes en Huronie à une autre époque. Aujourd’hui, il reste 12 sœurs au couvent de Sahagun. La moyenne d’âge fait tout près de 80 ans. Je suis seul au petit déjeuner, avec une hospitalera qui me sert le café. Elle m’offre une croix de porcelaine, fabriquée par des artistes de la région.  Les sœurs vendent ces croix pour financer leurs œuvres charitables. Elle m’explique que l’albergué et le couvent sont ouverts que 8 mois l’an, et que l’hiver, l’équipe séjourne au Péru pour gérer un programme d’éducation des enfants. Après le repas, elle me bénie et me souhaite que Dieu veille sur mon Camino. C’est une façon inusitée de débuter ma journée, mais aucunement désagréable.

Je quitte l’albergué et me rend directement à la gare de train. En risquant trahir la bénédiction matinale, je n’avais jamais prévu faire la prochaine étape à pied. Des dizaines de pèlerins que je croise, 2 rapportent avoir marché pour entrer dans Léon où le sentier pédestre converge avec l’autoroute, et on marche pendant 4 h en craignant qu’une voiture nous percute. Je ne regrette aucunement le voyage en train. Je ne me sens aucunement coupable.

Leòn est magnifique. Une vraiment belle ville. J’y retrouve des amis de marche, et de la sangria. Une soirée presqu’en famille.

Je change de système pour mes pieds. Plus de duct tape. Que de la vaselina sur les pieds. Puis, je change de bas à tous les 3 hrs. Poof. Plus d’ampoules, plus de douleur.

À la reprise de la marche je suis en pleine forme. J’héberge à l’albergue Saint Antoine de Padoue. Le saint préférée de ma mère et le patron des causes perdues. Chose rare, on nous sert un repas végétarien!! Tous se réjouissent de revoir des légumes!! Gaspacho et paella maison et une crêpe au chocolat avec de la crème chantilly pour le dessert. Le bonheur!!!

astorga_08Le lendemain, Brierly me promet « gently rolling hills ». Je me méfie. Avec raison. La route est recouverte de pierre inégales, lousse, qui tournent les pieds. Pourtant, sur ce terrain instable, ce sont surtout mes genous qui souffrent. J’ai beaucoup de douleur au genou gauche. Je traverse un village et un homme me demande d’où je viens. Je lui répond, du Canada. Il m’invite à patienter et à entrer chez lui. Je me dis que si c’est un meurtrier, on ne retrouvera jamais mon corps. Adieu Maman Dubeau! Je fais un homme de moi et entre dans son garage. Il ouvre une petite boîte de bois. Je me dis « This is it. Here comes the chainsaw ». Dans le coffre, il y a une photo de Elvis, des rubans, des épinglettes. Des bouts et des bribes laissé par des pèlerins. Il m’explique que ce sont des cadeaux de la part de gens qu’il a hébergé au fil des ans, quand les albergués débordaient. Il me montre une petite épinglette du drapeau canadien.

Puis, il sort une grande filière… (Trop petite pour voiler une scie mécanique). Il en sort des centaines de cartes postales. Des remerciements venus de partout dans le monde. Il me demande à nouveau de patienter, pendant qu’il entre dans la maison. Chain-saw. Il ressort avec un contenant de jus d’orange, me verse un verre et me souhaite un Buen Camino.

Je fais 33 km en un jour, mais suis blessé au genou. Il me faut du repos.

Je prends un hôtel exorbitant, et me couche. Un repos obligé à Astorga, la capitale du chocolat en Espagne. On a vu pire, tout de même!

purpose_03I’ve been walking the méseta for two days. The distance between villages is greater and the terrain is, almost entirely, flat. It’s like walking across the prairies.

We are walking on senda now. Brierly, the author of the guidebook everyone from the English speaking world is using, calls it a soulless surface. I call it blissfully level and not overly covered in loose, treacherous stone. Hallelujah! For the first time in weeks, I have been able to look up from my next step without fear of breaking my neck.

In the beginning, when I would look up, I might see two or three pilgrims, interspersed at intervals of a few hundred feet. Now, I can see dozens of walkers, stretched out over miles. The clusters are closer now, and the groups are more numerous, as though in the midst of this vast expanse, we intuitively turn to each other for reassurance and motivation.

I have been humming and thinking a lot. The humming starts first. Usually, an unexpected but happy song pops up. Yesterday it was « Young at heart ». Turns out, I miss George Burns. Who knew?

purpose_01The thinking comes after a few km. For the past two days, I’ve been thinking a lot about « purpose ». What gives us a sense of purpose? How do we define it? Nurture it?

Out here, few things give as clear a sense of purpose as primary needs. If I don’t find food and water every day, I will go hungry and dehydrate quickly. This is counterproductive and incites one to make a certain effort. Likewise shelter. If I do not make it to the next town with a bed, I will sleep outside. This incentivizes walking, to be sure. It may be that the Camino has recallibrated my sense of purpose, in keeping with the evolutionary need to survive. But there’s more to purpose than that.

purpose_02I have frequently been awed by friends and family who draw their deepest sense of purpose from the need to provide not just for themselves, but for those they love. This must be what drives parents to get up repeatedly throughout the night with their newborns. I know the need to provide was a driving force for my parents, and continues to be for my siblings. Surely, the drive to nurture life, to foster a young person as they make their way through life must also be a substantial source of purpose.

Many of the people whose paths I have crossed on this walk are hoping to discover or renew their sense of purpose. This is a tall order. A lot of people undertake the Camino in search of an epiphany. They’re hoping to hear a little voice tell them something along the lines of « You’ve been wasting your time. Quit your desk job and follow your passion. Become a surfer! Post haste! » Many of them, regardless of the epiphany, will come to a decision and make a change of their own accord. The road will give them time and assurance to make a change. What’s this say about purpose?

I think it stems from a sense of self. From a knowledge and understanding of our innate strengths, weaknesses, passions, of what gives us joy, of what can derail and discourage us. The Camino gives us time and space, and spontaneous encounters with people who aren’t just geared at small talk. They’re open and willing to encourage those they meet along the way to fully realize their potential.  And that, I think, is one of the fonts of purpose: our inherent need for fulfillment.

Whatever talents or gifts each of us has, we all feel better, happier, more complete, when we find occasion to let these strengths shine through.

I see many kinds of walkers on the Camino. John spends hours planning for he and his wife: where to stay, when to leave, how long it should take per km, where to find water, fruit, etc. He’s got drive, and logistical skills, and purpose aplenty. Helen gets up early, sometimes working on little sleep, and just walks till she’s tired, or spots a place she’d like to visit. Does she have any less purpose?

On the Camino, Purpose, I think, isn’t just about achievement, or results. In fact, those who focus principally on results tend to grow frustrated or disappointed over time. Life, and the Way, have funny ways of surprising you and throwing you off your plan.

Here’s the thing: Grant reports, and I read thousands through the years, attest to the fact that you can achieve regular, substantial results, without finding fulfillment… We tend to neglect process and long term, lasting change when we’re shooting for short term outcomes.

I suspect there’s a comparable proportion of purposeful over and underachievers. So what’s that mean? I think it confirms the notion that titles, salaries and track records don’t substantiate purpose. It comes from within us. It stems, somehow, from what is most profoundly meaningful to each of us. I suspect that investing a bit of time and energy to figure out whatever those factors are to each of us, at different moments of our lives, may be worthwhile.

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Je quitte tard de Burgos, le ventre bien rempli du petit déjeuner copieux de l’hôtel. Mais j’ai de la misère à m’y remettre, à retrouver le rythme. La sortie de la ville n’a pas grand chose d’attrayant, sinon une ballade sur le campus de l’université de Burgos. Puis, je passe 90 minutes à traverser une zone de construction au bord de l’autoroute. Il y a de la poussière, du bruit puis des grands camions partout. Mes allergies sont épouvantables. Au bout de seulement 14km, je sens qu’il faut que je m’arrête. Je trouve un albergué à Rabé. La propriétaire, très sympathique, m’annonce qu’il y aura une festa en ville ce soir. Peu importe. Je m’arrête ici. Power siesta. Journée frustrante.

burgos_04Assis devant l’albergué, je jase avec un jeune couple d’Israel. Puis, un 18 roue s’installe devant nous. Plutôt, il cherche à s’installer, de peine et de misère. Il stationne à 4cm de la table où nous sommes installés. On déplace la table, et les bancs, et les bacs de fleurs. Le truck veut passer. Il passe de justesse, avec 2 cm entre sa roue et l’escalier de notre albergué. Derrière le truck, il y a la scène pour le festival. Ils installent la scène à 2 pieds de la porte de notre albergué. Je semble avoir mal compris l’avertissement de notre hospitalero. Je croyais qu’elle m’informait qu’il y aurait un festival en ville… Elle m’informait que j’allais dormir dans la loge.

C’est la fête de la Patronne du village. Comme tous bons Chrétiens, les Espagnols marquent cette fête par un événement sobre, propice à la prière et la réflexion: un festival de 80s rock qui débute dès 23h30, et qui finira après 6h.

Personne ne dort. Notre hospitalero baille en nous versant un café matinal. Mais nous attendons que les saoulons entrent chez eux avant de sortir de l’albergué.

Il tombe une substance blanche que je préfère ne pas nommer… Mais avec laquelle mes amis canadiens sont intimemement familier. Je marche à la noirceur, dans l’air frais.

Je fais bonne route. Je traverse plusieurs petits villages, et m’émerveille d’une marche aussi agréable après une nuit blanche. Je passe par San Anton, où les ruines d’un couvent du 11e siècle embrassent la route. Puis j’arrive à Castrojeriz, où l’on trouve un monastère et les ruines d’un chateau sur une montagne. Près de 30km aujourd’hui. Je me sens moins frustré par ma journée d’hier. Lessive et sieste avant de concocter le plan de match pour demain.

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Depuis Santo Domingo, nous passons par des villages fantômes. La plupart ont une population actuelle de moins de 100 personnes. À comparer à ces villages, Perkinsfield est une métropole.

Plusieurs de ces villages étaient importants à une autre époque. Ils étaient des points d’arrêts intéressants sur le Camino. Aujourd’hui il reste que des cassas vide, tombées en décrépitude. Nous entrons dans un village, lieu de naissance de Santo Domingo, et trouvons un seul « bar » où il est possible d’acheter de quoi grignoter ou boire en poursuivant notre trajet. Ce « bar » est une résidence privée où une dame octagénaire sert de barrista. Elle est tellement courte qu’à prime abord, je ne la remarque pas derrière le bar. Quand je l’apperçois, elle me fait sursauter. Ceci dit, elle me vend un excellent gâteau aux pêches et amandes et une limonade fraîche. Nous sommes bien accueillis quand même. Je crois qu’elle opère le seul commerce en ville.

burgos_05Un peu plus loin, nous passons par une ville où les édifices datent peu. Il y a un terrain de golf, une grande piscine municipale, et des centaines de maisons vide. De toute évidence, la communauté à été construite au moment de la crise économique, et les propriétés ne se sont pas vendues tel que prévu.

J’arrive à Villafranco au bout d’une brève journée de marche. Je me paye une chambre privée à l’hôtel/albergue. Je soupe avec un groupe de femmes du Québec, puis je retrouve des amis Torontois et Suédois. Une soirée agréable, en bonne compagnie.

Bon, c’est le temps de la confession. Le lendemain, j’ai un lift pour entrer à Burgos. Bon. Je viens d’en décevoir quelques uns. Lo siento. La quasi totalité de mes amis pèlerins prennent l’autobus pour entrer à Burgos. Pour ma part, je file dans une très grande Volvo, gracieuseté des Affaires Étranges. En l’espace de 20 minutes d’autoroute, nous parcourrons une distance qu’il m’aurait fallu 15 de marche pour traverser. Vive la technologie!

En passant, un petit avertissement, si tout va tel que prévu pour la suite de mon Camino, je risque d’en décevoir d’autres. Je suis pèlerin, pas puritain, ni puriste. Je crois que la marche me fera du bien, mais ne crois pas forcément à l’auto flagellation.

Je déjeune avec Deric, puis nous passons la journée à fouiner à Burgos. Une très belle et charmante ville. C’est agréable de retrouver un ami qui me connais d’avant le camino. Ça rappelle la vie d’avant et d’après.

burgos_03J’aime bien Burgos. Je passe une partie de mon séjour à faire de la paperasse à l’hôtel, puis je visite la cathédrale et retrouve mes amis de l’Alaska, l’Afrique du Sud et Seattle pour le souper. Une journée de repos qui soulage profondément mes blessures aux pieds. Ce serait facile de succomber aux attraits de la vie sédentaire, en hôtel. Mais mon corps a le goût de poursuivre la marche.